Des associations économiques et de consommateurs dénoncent les avantages injustifiés des plateformes en ligne à bas prix
15.11.2024
Dans une lettre adressée au Conseil fédéral, de nombreuses associations économiques et de consommateurs demandent au gouvernement de rétablir des conditions d'égalité. Les plateformes en ligne à bas prix comme Temu et Shein sont injustement avantagées puisque pour elles, diverses lois helvétiques ne s’appliquent pas ou ne sont pas mises en œuvre. Elles peuvent ainsi livrer en Suisse en toute légalité des marchandises de mauvaise qualité, peu sûres et parfois toxiques, exemptes de taxes de recyclage et le plus souvent sans TVA.
L'approche des fêtes de fin d'année aggrave les inquiétudes des acteurs du marché quant aux conditions d'équité du commerce suisse et à la santé des consommateurs, en particulier celle des enfants. Les organisations signataires demandent notamment le Conseil fédéral à réagir à la plainte déposée en mai auprès du SECO, à rappeler officiellement Temu à l'ordre et à informer du même coup le public des pratiques déloyales des sites de ce genre.
Chaque jour, jusqu'à 500 000 colis en provenance d'Asie arrivent en Suisse et sur ce nombre, il est prouvé que beaucoup contiennent des produits qui ne répondent pas aux normes de sécurité suisses. Une enquête de l'Association suisse des jouets montre que 15 des 18 jouets commandés sur Temu et Shein ne seraient pas commercialisables. Les tests européens sont tout aussi alarmants : plus de deux tiers des jouets et vêtements examinés présentent des défauts de sécurité et comportent des substances nocives et interdites.
De plus, les produits de ces marchés en ligne, acheminés individuellement par fret aérien, ont un coût environnemental considérable. L’empreinte carbone de ce mode d'expédition est jusqu'à 50 fois supérieure à celle d'un envoi conventionnel par conteneur. Parallèlement, ces plateformes jouissent d'un avantage critiquable grâce à des exonérations fiscales pour les produits de moins de 62 francs, ce qui non seulement affecte le commerce suisse, mais occasionne aussi un manque à gagner considérable pour l'État.
Les organisations signataires demandent donc au Conseil fédéral de prendre rapidement des mesures afin d’obtenir que toutes les marchandises importées et vendues en Suisse répondent aux normes de sécurité des produits en vigueur dans notre pays et assurent la sécurité des consommateurs. Une taxation équitable des produits en provenance de l'étranger s’impose également pour garantir le financement des infrastructures et des mesures de protection de l'environnement. Les organisations signataires insistent encore sur le renforcement du contrôle et de la réglementation des marchés en ligne en vue d'empêcher la vente de produits dangereux ou contrefaits. Les directives de la protection des données doivent être améliorées afin de protéger les données personnelles des consommateurs suisses et il faut obliger les grands commerces en ligne basés à l'étranger à désigner une représentation juridique en Suisse pour garantir le respect des lois locales.
Avec l'entrée en vigueur du règlement sur la surveillance du marché, l’UE a comblé dès 2021 des lacunes législatives qui demeurent encore ouvertes en Suisse. De plus, le Digital Markets Act de l'UE place les grandes plateformes devant leurs responsabilités. Ce dispositif permet à l'UE de prendre aujourd'hui des mesures contre des sites comme Temu et Shein. Ayant constaté plusieurs infractions au Digital Services Act, la Commission européenne a contraint Temu à se mettre en conformité dans un délai d'un mois. Cette décision de Bruxelles confirme le caractère urgent du problème. Un avertissement officiel du Conseil fédéral permettrait d'attirer l'attention de la population suisse sur les dangers de ces plateformes en ligne, en particulier à l'approche des fêtes de fin d'année ; il signalerait du même coup que la protection des consommateurs est une préoccupation majeure des acteurs du marché suisse.
Les organisations signataires en appellent au Conseil fédéral pour mettre en œuvre les adaptations juridiques nécessaires. Il s'agit de donner un signal fort en faveur de la protection des consommateurs et des règles de concurrence équitables.